Suivis floristiques
Vous êtes ici : Accueil | La réserve de la Belle Henriette | Que fait la réserve ? | Suivis biologiques et scientifiques |
Après en avoir été artificiellement déconnectée durant une quarantaine d’années, la lagune est de nouveau et naturellement en relation avec l’océan depuis 2014. Sur le plan des habitats naturels, cette reconnexion a pour conséquence le passage d’un système lagunaire avec des habitats doux et subhalophiles de type roselière ou mégaphorbiaies à un système de lagune en mer à marée avec une mosaïque d’habitats intertidaux.
Loin d’être une régression sur le plan écologique, l’évolution naturelle de la lagune de la Belle Henriette, phénomène quasi unique en France à cette échelle, s’accompagne d’habitats naturels rares et de paysages uniques entre terre et mer. Cette renaissance confère à la lagune une richesse floristique et des fonctions écologiques d’intérêt national et européen.
- Evolution des habitats naturels
- Espèces végétales patrimoniales
- Orchidées de la réserve
- Espèces exotiques envahissantes
Un suivi à partir de 5 transects
Afin de suivre l’évolution naturelle de la lagune et documenter le retour à une situation qui existait depuis la formation de la lagune au début du XXe siècle jusqu’à sa déconnexion artificielle en 1972, l’équipe de gestion de la réserve à mis en place un dispositif de suivi des habitats naturels constitué de 5 transects.
Un point GPS est établi à chaque changement d’habitat ou de végétation le long du transect et tout un ensemble de données phytosociologiques est recueilli. Chaque suivi doit être répliqué avec la même hauteur d’eau qui peut varier d’un même coefficient à l’autre (marnage et hauteur d’eau étant deux choses différentes). Les suivis sont réalisés en évitant toute surcote liée à la houle ou à la pression atmosphérique.
Principales tendances
Les principales tendances observées depuis la mise en place de ce suivi en 2015 (juste après la reconnexion de la lagune à l’océan) sont :
- une disparition totale des milieux dulcaquicoles ou subhalophiles qui étaient jusqu’alors caractérisés par des roselières, des mégaphorbiaies ou des jonchaies/caricaies et leur « remplacement » logique et rapide par des habitats halophiles de type gazons à Salicornia europaea et Suaeda maritima, fourrés à Halimione portulacoides, Tripolium pannonicum ou Sarcocornia perennis. Toutefois, les gazons à salicornes annuelles peuvent subitement disparaitre de façon encore assez inexpliquée mais sans doute liée au rythme des nouvelles passes et des arrivées d’eau marine,
- une régression très nette des dunes grises et surtout une disparition des digue/dunes réalisées en urgence après le passage de Xynthia. La granulométrie, la salinité (sable récupéré en bas d’estran) ou encore la géométrie de ces digues/dunes (trapézoïdale) ne pouvaient aucunement permettre la régénération et la stabilisation à long terme d’un cordon dunaire. Ces dernières ont donc été progressivement érodées par l’action marine et ont évolué en bancs de sables. Sur certains secteurs de la réserve, on assiste à la reformation naturelle de cordons dunaires à partir de ces bancs de sables. Leur localisation, leur granulométrie, leur composition halo-nitrophile permet le développement naturel d’une végétation typique de la dune embryonnaire. Le phénomène naturel en marche est à tel point efficace que par endroit, la dune vive se reconstruit rapidement et durablement.
En haut à gauche : Dune vive (RNN BH) – En haut à droite : Pré salé (RNN BH) – En bas à gauche : Dune grise (RNN BH) – En bas à droite : Dune boisée (RNN BH)
Onze pour cent des espèces végétales présentes sur la réserve ont un enjeu de conservation national, l’une d’elle, l’Euphorbe péplis (Euphorbia peplis) étant d’ailleurs considérée comme taxon prioritaire. Les autres espèces sont des endémiques (ou sub-endémiques) françaises, ce qui leur confère un intérêt conservatoire considérable. Cet intérêt se double pour certaines d’une valeur biogéographique notoire : le Silène de Thore (Silene vulgaris ssp. thorei) trouve ainsi dans le secteur de la Belle Henriette les stations les plus septentrionales de sa petite aire d’endémisme franco-aquitain. Par ailleurs, au regard du nombre de stations sur la réserve et de leur valeur patrimoniale, l’Œillet de France, l’Euphraise de Jaubert ont un enjeu de conservation national.
Vingt-deux espèces (49 % du total des espèces patrimoniales) sont cantonnées dans les milieux dunaires de divers types, la dune boisée apparaissant comme le plus riche (avec 8 espèces). En termes de nombre de stations, c’est toutefois la dune mobile qui concentre le plus grand nombre (près du tiers) en raison d’espèces très fréquentes sur la réserve (mais très rare ailleurs) comme la Luzerne marine, le Silène de Thore ou le Panicaut des dunes. Les populations de la flore patrimoniale présente sur le site sont importantes et confèrent à la réserve un rôle crucial dans la conservation régionale de ces taxons liés au système dunaire.
Avant la reconnexion à l’océan, les milieux humides ou subhumides de la « lagune » et de ses abords concentraient presque autant d’espèces (19), soit 42% du total des espèces patrimoniales mais seulement 7.5% du nombre de stations (contre 71% pour le milieu dunaire). Depuis la reconnexion, les stations de ces espèces ont aujourd’hui quasiment disparu ou sont très dégradées.
En dehors du recul des dunes fixées et de la flore patrimoniale associée, les évolutions liées à la reconnexion de la lagune à l’océan ne doivent toutefois pas être considérées comme négatives. En effet, l’apparition de végétations halophiles soumises à la marée est d’un grand intérêt botanique et écologique, reconnu à travers le caractère prioritaire de l’habitat « lagune en mer à marée » au niveau européen.
En haut à gauche : Panicault des dunes (RNN BH )- En haut à droite :Lavande de mer (RNN BH)- En bas à gauche : Silène de Thore (RNN BH)- En bas à droite : Luzerne marine (RNN BH).
Les 7 espèces d’orchidées sauvages de la réserve font l’objet d’un suivi à part entière et complémentaire au suivi des espèces végétales patrimoniales. Majoritairement répandues sur les milieux dunaires, les orchidées, dont certaines ont un statut de protection élevé (Aceras antropophora, ophrys passionis, Epipactis phylantes…) sont suivies de façon à connaître précisément la localisation des pieds et leur nombre.
En haut à gauche : Ophrys passionis (RNN BH)- En haut à droite : Orchidée bouc (RNN BH ) – En bas à gauche : Orchis homme-pendu (Carrier) – En bas à droite : Ophrys abeille (Dolé)
A l’instar de nombreux autres espaces naturels, la lagune de la Belle Henriette n’est pas épargnée par la présence d’espèces exotiques envahissantes. Si toutes ne sont d’ailleurs pas exotiques, la très grande majorité sont ce qu’on appelle des « échappées des jardins ». Vendues en magasins de jardinage ou chez les pépiniéristes, certaines d’entre elles s’accommodent tellement bien des conditions que lui offre la nature qu’elles se répandent rapidement et sur de grandes surfaces, très souvent au détriment de la flore, voire de la faune locale.
Sur la réserve, on trouve ces espèces sur tous les types de milieux, mais surtout sur les habitats dunaires. C’est d’ailleurs dans les dunes que se développent les colonies de Yucca et d’Ailante (ou Faux vernis du Japon). Le Baccharris halimifolia et l’Herbe de la pampa se retrouvent quant à eux dans les zones plus basses, plus humifères et plus humides.
Toutes ces plantes envahissantes (une dizaine d’espèces) sont suivies par l’équipe de gestion de la réserve avec une géolocalisation et une estimation de leur nombre de pieds et/ou de la surface qu’elles recouvrent. A partir des connaissances acquises, l’équipe de la réserve mène des actions de contrôle ou d’éradication.
En haut à gauche : Baccharris – En haut à droite : Ailante (Titus) – En bas à gauche : Herbe de la pampa – En bas à droite : Yucca (Schneider)